mercredi 25 avril 2012

HISTOIRE SANS JEU

JEan-Pierre Castaldi était devenu maire d’une petite commune désertique près d’Avignon. À l’aide d’une échelle, il montait fièrement, au-dessus d’un bar miteux, une enseigne au nom de la ville, homonyme d’un département du Sud de la France : avaient rompu les accords de financement annuels certains conseillers régionaux, et tandis qu’une forte rivalité économique avait lieu avec le bled voisin, l’acteur se plaignait d’un énorme manque de contribution au budget de la municipalité. Il le revendiquait vivement sur la place publique, avec un rictus bizarre qui lui grossissait les lèvres, déformées.


Pendant ce temps, les billets de 300 euros existaient. Castaldi, en bon vivant devant l’éternel, tenait également un restaurant dans le patelin. Ce jour-là, sortant tout champêtrement de sa cuisine, il allait servir quatre femmes au coin de la salle, attablées devant une petite nappe provençale à grands carreaux bleus et blancs : trois vieilles filles de plus de cinquante ans, vêtues comme si elles en avaient quinze et aux cheveux décolorés, ainsi qu’une dame très âgée, édentée et impassible, ne bougeant pas et ne disant rien. En grand seigneur, l’ancienne gloire d’un immense succès de James Bond au cinéma leur apporta quelques plats tous à la fois avec entrain et énergie, dont une assiette supplémentaire de merguez :
« C’est pour vous ouvrir l’appétit, mesdemoiselles… Et la bouche », glissa Jean-Pierre.
Après le tour de la commande, le tarif allait sans doute passer.

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